I - Introduction.
Interrogeons-nous sur la lumière qui nous arrive des étoiles. Qu’observons-nous ?
- Une multitude d’étoiles. Mais certaines semblent très petites et d’autres plus grosses et on a l’impression que les plus petites sont les moins brillantes. C’est pour cela que les anciens parlaient de « grandeurs ».
- Réfléchissons.
- Qu’est ce qui peut affecter le caractère plus ou moins brillant d’une étoile ? Listons ce que nous estimons l’expliquer (par analogie avec une ampoule électriques avec lesquelles nous nous éclairons).
o La puissance en Watt : 80 > 50 watts
o La distance entre nous et l’ampoule
o Le diamètre de l’ampoule : à même puissance et à même distance une grosse ampoule nous paraître plus lumineuse qu’une petite.
o Et aussi ce qui peut s’interposer entre nous et l’ampoule : fumée, brouillard…
Alors, prenons les trois premières caractéristiques : puissance, distance et diamètre. Nous nous accorderons je pense pour conclure que :
De deux ampoules de même puissance, de même diamètre : la plus lumineuse sera la plus proche.
De deux ampoules de même puissance et posées à la même distance, le plus lumineuse sera la plus grosse.
Enfin que de deux ampoules de même grosseur et à la même distance, la plus lumineuse sera la plus puissante.
Alors nous pouvons dire que la perception lumineuse de l’objet, son éclat est :
Proportionnel à la puissance L (comme luminosité en astro) et au diamètre ou au rayon r et inversement proportionnel à sa distance D !
E est proportionnel à L.r / D
En réalité des expériences montrent que :
E= et L =σ T4 4 π d²
D’où : E = σ , ce qui, aux exposants près, est ce que nous avions déduit logiquement.
On voit aussi apparaître ici un élément que nous n’avions pas encore suspecté : la température T. On pouvait y penser si l’on se souvient qu’un corps est d’autant plus lumineux qu’il est plus chaud : un fer rougit au feu est moins brillant que le même fer chauffé à blanc. Et ici nous remarquons en même temps une relation entre la couleur et la température.
C’est intéressant car pour les étoiles, il est difficile de mesurer directement la puissance, difficile de poser un thermomètre dans leurs flancs mais facile d’observer leurs couleurs.
Alors que peut-on mesurer ?
Le rayon de l’étoile
Sa distance
Sa température.
Et encore ?
Moins intuitivement :
Sa masse
Sa composition chimique
Son âge.
Mais toutes les étoiles semblent à la fois semblables et différentes. Faisons maintenant une comparaison hardie entre les étoiles et les arbres d’une forêt, de chênes par exemple. Il y a autant d’arbres différents que d’étoiles différentes. Mais pour les arbres on sait qu’un petit chêne formé de deux feuilles sorties d’un gland va devenir un arbuste puis un grand chêne et va finir par mourir. Nous n’avons pas besoin de suivre la vie d’un chêne et donc de vivre plus de 500 ans pour comprendre que toutes les formes que nous voyons ne sont que des étapes évolutives d’une même entité : un chêne. Nous pouvons aussi, sans trop de risque de nous tromper, estimer qu’il doit en être de même pour les étoiles. Les étoiles qui vont avoir des caractéristiques différentes de couleur, de taille, de luminosité sont probablement des étapes au cours de leur évolution. Pas besoin d’attendre 10 milliards d’années pour décrire l’évolution stellaire ou au moins pour s’attaquer au problème. Rappelons que cela n’a pas été toujours évident et que pendant longtemps on pensait les étoiles immuablement fixes et stables.
Quelles caractéristiques de ces étoiles nous échappent ? Plusieurs choses importantes :
La température centrale
La composition chimique centrale
Ce qui produit l’énergie de l’étoile pour donner sa luminosité.
Ces éléments nous permettront ensuite de tracer la vie des étoiles.
II - Présentation des sujets abordés
Nous verrons comment mesurer les paramètres observables :
Rayon, distance, luminosité
Masse, composition chimique et âge.
Puis nous essaierons de comprendre comment en déduire ce qui nous intéresse le plus : comment fonctionnent ces divines étoiles.
III - Sources :
Cours de licence université Lyon 1.
Cours sur les étoiles de l’université de Sheffield (UK).
Photométrie de G. Paturel et A. Brémond. Bulletin SAL
Astronomie et Astrophysique : Formation de base et A propos de l’âge de l’Univers. Cours de L. Bottinelli, M. Gerbaldi et L. Gouguenheim. CNED.
Livres :
Fundamental astronomy. Hannu Karttunen et al. Springer ed.
L’observation en astrophysique. P. Léna et D. Rouan. EDP sciences
Astronomie-Astrophysique. Agnès Acker. Dunod.
IV - Rappels de physique
1-La lumière
Fréquence ν et longueur d’onde λ sont reliées par la relation :
, avec c=2,99792458.108 m.s-1 , vitesse de la lumière dans le vide.
Attention 1 nm = 10-9 m.
Exemple avec une longueur d’onde de 500 nm, la fréquence du signal est :
2,99792458.108 / 500. 10-9 = 2,99792458/ 500.10-1 = 0,0599 Hz
Pour la raie 21 cm :
2,99792458.108 / 0,21 = 1420 MHz (106 Hz)
où h est le constante de Planck : h=6.6262 .10-34
La lumière visible a une longueur d’onde :
380 nm ≤ λ ≤ 750 nm.
2-La photométrie : flux et magnitudes
(Voir Bulletin de la S.A.L. Paturel et Brémond)
2.1. Flux
Le flux, mesuré dans une longueur d’onde précise, est appelé flux monochromatique. C’est une puissance (comme celle d’une ampoule ou d’un appareil électrique, elle est en watt). C’est une quantité de lumière par unité de temps. Le flux monochromatique est donné par unité de surface (le m²) et par longueur d’onde (en microns : µm).
Si on « additionne » les flux de toutes les longueurs d’onde, on obtient un flux intégré par unité de surface :
F = ∫0 ∞ Fλ.dλ
Cette formule signifie que l’on additionne tous les flux Fλ pour les longueurs d’onde λ, par pas de dλ allant de 0 à l’infini.
Une surface S, perpendiculaire à la direction de la lumière, recevant un flux F recevra une puissance P= F.S, puisque que les objets sont si lointains qu’on peut estimer que la lumière vient de l’infini.
2.2 La luminosité
La luminosité L est une puissance émise par un objet (le flux est la lumière reçue). Elle est exprimée aussi en Watt. Elle est donnée pour la totalité de la surface et dans toutes les directions de l’espace et non pas seulement dans la direction de l’observateur : comme la lumière émise par une ampoule électrique.
Une unité souvent employée est la luminosité solaire qui vaut:
Lʘ = 3,83.1026 W
2.3. Dilution du flux avec la distance
En se propageant la lumière se dilue dans l’espace selon des sphères de rayons de plus en plus grands. A la fin, le rayon de dilution est la distance D de l’objet à l’observateur.
La surface de cette sphère est : S= 4πD2.
La quantité d’énergie, la puissance, reçue par l’observateur est appelée l’éclat E en astronomie, qui est ainsi en un point :
E = L / 4πD²
La puissance reçue de l’objet lumineux diminue comme le carré de la distance D.
Tout ceci sous-entend l’absence de modification de la lumière le long de son trajet et en particulier l’absence d’absorption, ce qui est faux. Il faudra en tenir compte et effectuer des corrections.
En remplaçant E, qui est une puissance par le flux F(D) qui est aussi une puissance on obtient la formule générale pour la luminosité :
L = 4πD²F(D)
où F(D) est bien le flux intégré sur toutes les longueurs d’ondes mesuré à la distance D de l’objet.
Pour une longueur d’onde donnée la luminosité devient:
Lλ = 4πD²Fλ(D)
Lλ est la luminosité monochromatique.
2.4. Les magnitudes
2.4.1. Magnitudes apparentes
Définies empiriquement par les Grecs, elles sont reliées aujourd’hui à la grandeur physique que nous avons vue, le flux.
La magnitude apparente monochromatique mλ est donnée par :
mλ = -2,5 log(Fλ) + constante
log est le logarithme décimal.
La constante est définie avec un flux de référence choisi de façon à ce que la magnitude soit égale à zéro.
mλ = -2,5 log(Fλ )
La différence de magnitude de deux sources est en relation avec le rapport de leur flux ou de leur éclat.
En flux intégré la formule peut s’écrire :
m1 – m2 = -2,5 log(Fλ )
Il existe plusieurs systèmes de magnitude en fonction du flux de référence.
Il existe en particulier des filtres qui définissent autant de magnitudes :
Filtre |
λ |
Fλ,0 |
Couleur |
U |
360 |
4,17 .10-8 |
UV |
B |
440 |
6,92 .10-8 |
Bleu |
V |
550 |
3,63 .10-8 |
Visible |
R |
700 |
1,73 .10-8 |
Rouge |
I |
900 |
8,35 .10-9 |
Infra-rouge |
J |
1250 |
2,99 .10-9 |
- |
H |
1650 |
1,14 .10-9 |
- |
K |
2200 |
3,96 .10-10 |
- |
L |
3400 |
8,18 .10-11 |
- |
M |
5000 |
1,9 .10-11 |
- |
N |
10200 |
10,2 .10-12 |
- |
Filtres du système de Johnson.
En pratique, on abrège le terme de mv par V etc.
Bien entendu ces mesures de magnitude apparente doivent être corrigées des effets atmosphériques et de l’effet de l’absorption interstellaire. Cette absorption est inversement proportionnelle à la longueur d’onde : le bleu est plus absorbé que le rouge.
Le principe de la correction utilise le type spectral et la classe de luminosité et une table qui donne la valeur intrinsèque de l’indice B-V : (B-V)0. On calcule alors un excès de couleur :
E(B-V) = (B-V) – (B-V)0
Pour la lumière visible V l’absorption est :
AV = 3,1 E(B-V). Avec cela on corrige la magnitude observée pour obtenir la magnitude réelle ;
mVcorr = mVobs - AV
magnitude limite |
nombre d’étoiles |
magnitude limite |
nombre d’étoiles |
6 |
3.000 |
14 |
6.500.000 |
8 |
23.000 |
16 |
20.900.000 |
10 |
165.000 |
18 |
142.000.000 |
12 |
1.100.000 |
20 |
506.000.000 |
Nombre d’étoiles observables en fonction de la magnitude limite d’un instrument.
La magnitude bolométrique correspond au flux intégré sur toutes les longueurs d’onde. Elle est mesurée avec un bolomètre. On utilise aussi la correction bolométrique donnée par des tables en fonction du type spectral de l’étoile et de la classe de luminosité.
2.4.2. Magnitudes absolues
La magnitude apparente, comme l’éclat, dépend de la distance de l’étoile. Deux étoiles peuvent avoir la même magnitude apparente mais produire des éclats différents. La magnitude absolue (M) est la magnitude qu’aurait l’étoile si elle était placée à une distance de 10 parsecs.
La formule : mλ – Mλ = 5 log D – 5 et appelée module de distance. D est en parsecs.
La magnitude absolue est reliée à la luminosité comme la magnitude apparente est reliée à l’éclat.
2.4.3. Indices de couleur
On définit les indices U-B, B-V etc. La valeur de cet indice est reliée à la couleur e à la température de surface de l’étoile.
B-V |
T |
Couleur |
<0 |
>10 000 |
Bleue |
0 |
10 000 |
Blanche |
0,7 |
5 500 |
Jaune |
1 |
4 500 |
Orange |
> 1 |
< 3 500 |
Rouge |
3- Température effective
La température effective d’un corps est la température d’un corps noir rayonnant comme ce corps, c.a.d rayonnant le même flux intégré sur toutes les longueurs d’onde. En fait, dans une étoile, ce qui est pris en compte, c’est le rayonnement dû à la photosphère : la partie superficielle de l’étoile. En réalité c’est un volume, une coquille mince, mais comme il est petit devant le volume total de l’étoile on peut considérer que c’est une surface.
Soit rp le rayon au niveau de la photosphère, le flux intégré sera :
F(Rp)= L / 4πr²p
Le spectre du corps noir est donné par la formule de Planck. Elle précise que pour une longueur d’onde donnée λ, le flux monochromatique ne dépend que de la température T. La formule peut sembler compliquée :
Fλ(T) = 2πhc² / λ5 racine (ehc/λkt - 1)
Avec k la constante de Boltzman = 1,38.10-23 JK-1
On pourrait la simplifier en ignorant les constantes que sont π, h, c. Le flux est alors inversement proportionnel à la longueur d’onde à la puissance cinquième et proportionnel à la racine carrée d’une valeur où apparaît e (pour exponentielle) à la puissance T : la température. On reverra cela avec des exemples d’étoiles.
Les abcisses sont les longueurs d'onde en nm/100
Figures : Flux lumineux d’un corps noir en fonction de la longueur d’onde et de la température.
De la loi de Planck on déduit deux lois simplificatrices :
Le flux intégré est donné par la loi de Stefan :
F(T) = σ T4 où σ est la constante de Stefan = 5,669. 10-8 Wm-2K-4
Le flux lumineux d’un corps ou l’énergie totale émise par seconde pour une surface unité, s’élève donc très rapidement avec la température de ce corps (T4) :
Le flux émis par un corps noir à une température donnée est maximum pour une longueur d’onde (encore appelée λ pic) formulée par la loi de Wien :
λm = 2898 / T
Figure : pic de longueur d’onde en fonction de la température.
La température effective d’une étoile, c’est-à-dire de sa photosphère qui est une surface de rayon Rp, permet de calculer le flux intégré de cette photosphère :
F(Rp) = σ T4e
Sa luminosité sera donc L= 4πR2pσTe 4 et on peut donc estimer la température effective d’une étoile :
Te = ( L / 4πσR²p) 1/4
Si on a pu mesurer sa luminosité et son rayon.
Suite: II: Spectres stellaires