A la découverte des planètes invisibles.

 Uranus, Neptune et Pluton

 

I- Uranus

C'est William Herschel (1738-1822) qui découvre par hasard la planète Uranus. Ce musicien et facteur d'orgue avait construit un des meilleurs télescopes de son temps. Ce treize mars 1781, il examine de façon méthodique une portion du ciel et découvre un objet qu'il pense être une comète. Deux raisons lui font penser qu'il ne s'agit pas d'une étoile: elle se déplace et sa taille augmente avec les changements de grossissements. Il signale sa découverte à Thomas Hornsby alors astronome de l'observatoire de l'Université d'Oxford et à Neville Maskelyne astronome royal à Greenwich. Ils confirment qu'il peut s'agir d'une comète mais fait inhabituel, ils ne trouvent pas de queue ni de coma. Le 26 avril cette découverte est rapportée à la Royal Society. Charles Messier, grand spécialiste des comètes déclare que ce nouvel objet n'est pas une comète. C'est finalement Anders Lexell astronome à Saint-Pétersbourg qui calcule son orbite qui est elliptique, au-delà de celle de Saturne et il déclare qu'il s'agit d'une nouvelle planète. C'est le président de la Royal Society qui annonce lui-même à Herschell qu'il a découvert une nouvelle planète. Herschell reçoit la médaille Copley le trente novembre 1781. Toute l'Europe astronomique le félicite, Lalande, Bode… Il est présenté au roi George III qui fait de ce musicien un astronome officiel. Cette planète nommée en Angleterre l'étoile du roi George, Herschel en France sera nommée finalement Uranus à la suite de Bode. Herschell découvrira deux satellites de sa planète, Obéron et Titania.

Herschell

 

II- La découverte des astéroïdes.

En 1723 l'astronome Christian Freiher von Wolf observe que si on prend l'orbite de la Terre comme référence, les calculs astronomiques indiquent que celles des autres planètes sont dans une relation qui paraît simple: 5, 7, 15, 52 et 95. Un peu plus tard en 1766, le Prussien Johann Daniel Titius von Wittenberg définit une règle mathématique qui relie les distances des différentes planètes entre elles (tableau 1). Johann Ebert Bode en accepte l'idée, la recopie dans son livre sans citer Titius. Voici pourquoi cette loi portera le nom de Loi de Bode.

Bode          Titius

Planète

Rayon (en UA)

Rayon selon Titius

Mercure

4

4 + 0 = 4

Vénus

7

4 + (1 * 3) = 7

Terre

10

4 + (2 * 3) = 10

Mars

15

4 + (4 * 3) = 16

?

 

4 + (8 * 3) = 28

Jupiter

52

4 + (16 * 3) = 52

Saturne

95

4 + (32 * 3) = 100

 

Tableau 1: Loi de Titius. Le point d'interrogation figure une planète manquante prédite par la théorie.

 

Par bonheur pour cette théorie, Herschell découvre une nouvelle planète Uranus qui complète à merveille le tableau:

Uranus

192

4 + (64 * 3) = 196

C'est un triomphe qui encourage la recherche d'une planète entre Mars et Jupiter. Von Zach va consacrer treize ans de sa vie à cette recherche sans succès. Il fonde même un club d'astronomes qui se partagent le zodiaque mais toujours sans succès.

C'est Giuseppe Piazzi de Palerme qui en 1801 signale un objet dans la constellation du Taureau qui change de place chaque nuit. Mais personne d'autre que lui ne la voit. Gauss reprend alors les données d'observation de Piazzi et calcule l'orbite de cet objet mystérieux. Il décrit sa position à Von Zach qui oriente son télescope et trouve enfin exactement au lieu prévu par Gauss, dans la constellation de la Vierge une nouvelle planète. Piazzi prévenu la nomme Cérès.

Piazzi

Le 28 mars 1802 c'est au tour de Heinrich Wilhelm Olbers de découvrir une autre planète, elle aussi avec une orbite située entre Mars et Jupiter. Il l'appelle Pallas.

C'est Herschell qui les étudie et montre que leurs orbites se croisent et que ce sont de petites planètes, il leur donne le nom d'astéroïdes. C'est grâce à son astromètre qu'il a pu les mesurer. Cet appareil est tout simplement une planchette percée de trous de taille croissante placée devant une source lumineuse et parallèlement au télescope.

D'autres astéroïdes sont vite trouvés: Junon par Harding en 1804, Veta par Olbers la même année. Pour sauver la loi de Bode Olbers déclare qu'ils représentent une planète fragmentée.

 

III- La découverte de Neptune.

Les progrès des mathématiques appliqués à l'astronomie sont fulgurants et permettent aux astronomes de calculer les effets des planètes sur leurs orbites respectives: les perturbations.

Les travaux portent vite sur la dernière planète découverte, Uranus. Bode et Alexander Fixelmillner, un autrichien, retrouvent des anciennes observations d'Uranus que John Flamsteed avait relevé en 1690 sans savoir qu'il avait affaire à une nouvelle planète! En les comparant aux données plus récentes elles ne permettent pas de définir une orbite correcte. En 1790 Jean Baptiste Delambre tient compte des effets de Jupiter et de Saturne, rien n'y fait: de nouvelles observations contredisent ses résultats. C'est alors Alexis Bouvard, un assistant de Laplace qui refait les calculs en incorporant des relevés de Pierre Charles Le Monnier: la prise en compte des perturbations ne permet pas de définir l'orbite d'Uranus. De nombreuses explications plus ou moins farfelues sont avancées et parmi elles pourquoi pas une autre planète au-delà de l'orbite d'Uranus ?

Le problème est que la longue période d'Uranus ne permet pas de colliger facilement de nouvelles données.

Deux astronomes vont s'atteler séparément à la tache sans se connaître: Adams en Angleterre et le Verrier en France.

-         C'est Adams qui commence le premier. Il prend comme référence la loi de Bode et imagine une planète nouvelle située à la distance de 4 + (128 * 3) = 388 UA. A partir de cette hypothèse, de la présence de Jupiter et de Saturne il calcule l'orbite théorique d'Uranus. Ses calculs ne sont pas satisfaisant. Il corrige en imaginant pour la planète inconnue une orbite non pas circulaire mais elliptique puis une orbite plus proche de celle d'Uranus. A la fin du mois de septembre 1845 le modèle prédit une orbite d'Uranus à peu près correcte. Il lui reste à calculer sa longitude sur l'écliptique. Le 1er octobre 1845 il trouve 326,5° . Il prend rendez-vous avec Airy astronome royal à Greenwich. Airy lui demande quelques explications supplémentaires puis part en voyage.

-          François Arago confie en septembre 1845 à Le Verrier la tâche de calculer l'orbite d'Uranus. Il commence, comme son collègue, à prendre en compte la présence de Jupiter et de Saturne. Comme lui il suit la loi de Bode pour imaginer une nouvelle planète perturbatrice. En juin 1846 il aboutit et calcule la longitude de la planète. L'observatoire de Paris ne la trouve pas. Le 31 août il publie ses résultats toujours sans connaître les travaux d'Adams. Il calcule une position pour le 1er janvier 1847.

-          Adams continue à travailler. Le 2 septembre 1845 il calcule sa distance au Soleil à 373 UA au lieu des 338 prévus par la loi de Bode. Airy au courant des travaux de Le Verrier prend alors conscience de l'importance des travaux d’Adams. Il confie la recherche de la planète au télescope de Cambridge: eux non plus ne la trouvent pas.

-          C'est finalement Galle à Berlin, sur les indications de Le Verrier, qui, les 23 et 24 septembre la trouve et montre que cet objet en forme de disque se déplace d'un jour sur l'autre: c'est bien une planète.

-          Le Bureau des Longitudes la nomme Neptune. C'est la gloire pour Le Verrier.

 

IV- La découverte de Pluton.

Ce sont encore les études des perturbations qui sont à l'origine de la recherche de cette planète. Depuis, l'astronomie bénéficie des progrès de la photographie. Le ciel est exploré de façon systématique. Clyde Tombaugh photographie le zodiaque en faisant trois photos de chaque zone à partir de septembre 1919. Par la méthode visuelle du "blink comparator" il est facile de déceler un objet qui n'a pas la même position sur deux photographique du même site prises à distance l'une de l'autre. Le 18 février 1930 il découvre dans la constellation des Gémeaux une nouvelle planète qui sera nommée Pluton.

 

Références

Cohen I. B. Les origines de la physique moderne. Le Seuil édit. Paris 1993

Dictionnaire de l'Astronomie. Encyclopédie Universalis. Albin Michel Paris 1999.

Nitschelm Ch. L'astronomie de la préhistoire à nos jours. Burillier. Vannes 2000.

Sageret J. Le système du monde. De Pythagore à Eddington. Payot Paris 1931

Sandage T. The Neptune file. Berkley Books, New York 2000

Vaucouleurs Gérard de. L'esprit de l'homme à la conquête de l'Univers. SPES ed. Paris 1951

Verdet J-P. Une histoire de l'Astronomie. Le Seuil édit. Paris 1990.

Alain Brémond