II - Que peut-on observer des étoiles ?

Directement, on ne voit rien du centre des étoiles. Seuls les neutrinos et les ondes sismiques (astérosismologie) sont observables depuis la Terre.

Les paramètres mesurables sont : la distance, le rayon, la luminosité (et la température effective), la masse, la composition chimique superficielle et l’âge.

En définitive, le plus facile à mesurer provient de la spectroscopie. On a ainsi le type spectral, la classe de luminosité (naine, géante …) et les indices obtenus avec des filtres (B-V par exemple).

Ensuite on dispose des mesures des distances pour un très grand nombre d’étoiles, puis des rayons, de la masse.

Tous les paramètres sont liés entre eux. Lorsqu’on en connait deux ou trois, on peut en déduire d’autres. Par exemple :

            Si on connait le rayon  et la masse on a la densité

            L’éclat et la température et le rayon permettent de calculer la distance.

            La luminosité et le rayon donnent la distance

            La luminosité et la distance donnent le rayon

            Etc.

1-Mesure des distances

 

1.1. Méthode de la parallaxe

Base : le rayon de l’orbite terrestre

C’est la première distance mesurée par Bessel.

Pour la mesure des petits angles on a : sin α ≈ tan α ≈ α ; donc p ≈ tan p

 

 

Lorsque la Terre est en 1, on mesure la distance angulaire de l’étoile par rapport à une étoile lointaine : angle β. Lorsqu’elle est en 2, six mois plus tard, on refait la même mesure : angle α. La différence γ = β – α est égal à deux fois la parallaxe p. L’angle p est bien l’angle qui, depuis l’étoile sous-tend le rayon de l’orbite terrestre. Si on était sur l’étoile on verrait le diamètre de la Terre mesurer 2 X p.

Le parsec est la distance d’une étoile vue sous une parallaxe de 1 seconde d’arc. 1 pc = 3,08567802.1016m

La distance en pc est donnée par : d=1/p en secondes d’arc.

En pratique on photographie le ciel autour de l’étoile à étudier avec une CCD, une vingtaine de fois par an. Certaines semblent fixes, les étoiles lointaines, d’autres se déplacent de quelques dizaines de microns. On mesure ces déplacements et on les transforme en secondes d’arc. Les mesures à six mois d’intervalle donnent la plus grande différence de position. La limite des mesures est de 30 pcs. Aujourd’hui on dispose de mesures plus précises : Hipparcos est monté à 500 pc et Gaia devrait donner des mesures jusqu’à 20 kpc.

1.2. Méthode du point convergent

 

 

Une étoile quelconque se déplace de 1 vers 2 avec une vitesse v dite spatiale. Sur le fond du ciel, elle semble se déplacer de Etoile1 selon m : c’est son mouvement propre μ qui se mesure en secondes d’arc par an sur des photographies. Sa vitesse radiale, dans l’axe de l’observateur est la distance Etoile1 – C. (voir paragraphe : déplacement des étoiles). Pour mesurer la distance de l’étoile, il suffit ( !) de mesurer l’angle ʘ.

Comment mesurer ʘ ? Dans un amas ouvert comme les Hyades. Les étoiles de l’amas semblent, sur un temps long, converger vers un point de fuite que l’on peut mesurer:

 

 

L’angle ʘ est donné par l’angle entre le centre de l’amas et la direction du point convergent.

La limite des mesures est d’environ 300 a.l. Au-delà, il faut faire appel à d’autres méthodes.

1.3 Parallaxe dynamique

Elle se mesure avec les étoiles doubles. On utilise la troisième loi de Kepler et la relation masse / luminosité.

Пd est la parallaxe dynamique en secondes d’arc. M les masses des deux étoiles, P la période de rotation et a l’orbite relative des étoiles doubles.

1.4 Parallaxe statistique

Evaluée avec des groupes d’étoiles dont on connait la vitesse radiale et les mouvements propres moyens.

1.5. Parallaxe séculaire.

Le Soleil et par conséquent la Terre se déplacent en direction de l’Apex créant une parallaxe sur une très grande base, par exemple sur dix ans. En utilisant des groupes d’étoiles on gomme leurs mouvements propres individuels et on détermine la parallaxe statistique du groupe.

1.6. Autres méthodes :

            Spectroscopique : connaissant la magnitude absolue de l’étoile et en mesurant sa magnitude apparente on en déduit la distance. Problème : comment connaître la magnitude absolue sans connaître la distance ?

-          Par le type spectral ou l’indice B-V et la classe de luminosité de l’étoile, en les portant sur le diagramme H-R.

 

 

Dans cet exemple : B-V mesuré à 1,1 donne une M = 7. Connaissant la magnitude apparente on en déduit la distance.

           -  Ou par l’utilisation de diagrammes HR d’amas dont on a pu mesurer la distance par les méthodes précédentes et dont on possède donc la magnitude absolue. Soit maintenant des étoiles d’un amas de distance inconnue. Par l’étude de leurs spectres, on dessine le diagramme HR de l’amas avec sa magnitude apparente en ordonnée (la seule mesurable ici). On le superpose à la courbe de l’amas de distance connue en faisant coïncider la séquence principale et on lit sur le côté des ordonnées, la différence entre la magnitude apparente observée et la magnitude absolue donnée par l’amas calibré. On en déduit la distance de l’amas par la formule du module de distance.

 

 

Le module de distance de M67 est voisin de 9.8, pour un rougissement de 0.06. (ZAMS= zero age main sequence ou âge zéro de la séquence principale).

 

            Photométrique : Céphéides

            La période P de variation de la luminosité de ces étoiles variable est en relation avec leur magnitude absolue : M = k P. En mesurant la période on en déduit la magnitude M et avec la magnitude apparente, on en déduit la distance :

                                  m – M = 5 log d – 5 avec d en parsecs.

 

2- Le rayon

Il est mesuré par interférométrie, grâce aux occultations par la Lune, une planète ou dans les binaires à éclipses. Une méthode plus récente utilise la mesure du flux infra-rouge de l’étoile. Aujourd’hui on a pu imager en optique adaptative ou depuis l’espace des étoiles géantes (Bételgeuse, Gliese 623, O Ceti…)

2.1. L’interférométrie à large base. Avec deux télescopes distants de L mètres on augmente la résolution spatiale de λ/D à λ/L. On peut ainsi mesurer leur diamètre angulaire pour les étoiles proches.

2.2. Les tavelures (speckles) à partir de photographies successives de l’étoile qui se déforme très rapidement sous l’effet de la turbulence. Sur chacune des images on mesure un diamètre angulaire. On obtient un grand nombre de valeurs différentes. Certaines valeurs sont plus souvent rencontrées : la plus fréquente est proche de la valeur réelle. C’est Antoine Labeyrie qui est à l’origine de la découverte.

2.3 Les occultations d’étoiles par la Lune. On mesure le temps nécessaire pour occulter l’étoile avec une caméra CCD et la courbe de lumière.

2.4. Les étoiles doubles à éclipses, étoiles dont le plan orbital est dans la ligne de visée. Si l’orbite n’est pas inclinée et les orbites considérées comme circulaires on a la courbe suivante :

 

La partie à gauche correspond à l’occultation totale (fond carré) de l’étoile la plus brillante (profondeur plus grande) Dans la partie avant t1 les deux étoiles sont séparées. De t1 à t2 la petite étoile est en train de passer devant la grosse qui est occultée de t2 à t3 puis ressort de t3 à t4. Même chose à droite mais c’est la petite qui est occultée. Le fond est arrondi en raison des perturbations entraînées par le voisinage des deux étoiles et la dépression moins profonde.

 

Soit R1 le rayon de la grosse étoile et R2 celui de la petite. Le trajet de la petite étoile de t2 à t3 est égal à 2R1 – 2R2.

Pour aller de t1 à t4 le trajet est 2R1 + 2R2.

Si on suppose que l’orbite est grande devant le diamètre des étoiles on peut assimiler l’orbite à la corde de l’arc de cercle de la trajectoire. On a alors :

2R1-2R2 = V(t3-t2)

2R1+2R2 = V(t4-t1)

Et donc

R1=V(t4-t1+t3-t2)/4=V(t4-t2)/2

R2=V(t4-t1-t3+t2)/4=V(t2-t1)/2

 

2.5 Si on dispose de la mesure de luminosité et de la température on peut en déduire le rayon d avec :

                                    L =σ T4 4 π d²

3- La luminosité

C’est la puissance émise par l’étoile est connue par la mesure de la distance et de l’éclat apparent de l’étoile. La magnitude absolue est donnée aussi par la détermination de la classe de luminosité et le type spectral de l’étoile et le recours à des tables. On peut aussi connaître la distance de l’étoile en ayant étudié son spectre et en mesurant sa magnitude apparente et en appliquant la formule du module de distance.

 

 

Exemple de table.

4- La température effective

C’est celle d’un corps noir qui aurait la même dimension que l’étoile et qui émettrait la même quantité d’énergie. Elle est mesurée par le type spectral, par l’indice B-V et par l’intensité des raies.

 

Tableau donnant la température effective en fonction de l’indice B-V.

Une formule donne cette température connaissant la luminosité L de l’étoile et son rayon R.

Te = (L 4πσR2p)¼

5- La masse

Elle est calculée pour les étoiles doubles avec la troisième loi de Kepler :

Si a est le demi-grand axe, p la période et M1 et M2 les masses du système, on a :

a3 / p2 = M1 + M2

Si a1 et a2 sont les distances des composantes au centre de gravité du système, on a aussi :

a2 / a1 = M1 / M2

On mesure le rapport des grands axes en traçant leurs évolutions sur un diagramme :

 

 

Diagramme schématique du mouvement d’une étoile double.

 

L’ensemble se résout facilement pour calculer M1 et M2.

On pose a2/a3= k et a3/p2=j

D’où : M1 = k. M2 et donc j= k.M2 + M2 = (k+1)M2 donc :

M2= qui sont mesurés. On en déduit ensuite M1= k. M2

 

La relation masse-luminosité calculée à partir des étoiles doubles, permet aussi de calculer la masse connaissant la luminosité.

 

Figure : relation masse-luminosité en unités solaires.

La relation n’est pas linéaire :

L proportionnel à M4 pour des masses entre 1 et 30 masses solaires

L proportionnel à M2,4 pour des masses < 0,8 M solaires

L proportionnel à M² pour des très grandes masses.

 

 

 

On a approximativement :

M ≤ 1 M

L = M3,2

M > 1 M

L = M3,88

 

La masse est souvent donnée en masse solaire avec : 1 M = 2 1030 kg

Les masses des étoiles sont comprises entre : 0,08 M < M* < 120 M

  •  la limite inférieure correspond à une température centrale d’environ 7 millions de degrés en dessous de laquelle l’hydrogène ne peut fusionner. Seul le deutérium peut fusionner mais il est très peu abondant. Ainsi, les étoiles dont la masse est comprise entre 0,01 et 0,08 M sont des naines brunes. Au-dessous de 0,01 M, ce sont des planètes (aucune production d’énergie nucléaire).

  •  la limite supérieure dépend de nombreux paramètres. Au-delà de 120 M, la quantité d’énergie nécessaire compenser la gravitation les rend instables : les couches extérieures sont expulsées. L’étoile η Carinæ, qui atteint 150 M est un exemple de ces étoiles massives.

Masse

Type

M* < 0,01 M

planète

0,01 M < M* < 0,08 M

naine brune

0,08 M < M*

étoile

 

Il existe également une relation entre la masse et le rayon de l’étoile :

Pour les naines, il existe deux relations masse-rayon, selon la masse de l’objet, différant de la valeur de l’exposant :

M ≤ 1,1 M

R = M0,57

M > 1,1 M

R = M0,80

La masse est en masses solaires ainsi que le rayon.

La limite de 1,1 masses solaires sépare les étoiles de masse inférieure à 1,1 masses solaires qui ont un intérieur radiatif et une enveloppe convectives et les autres pour lesquelles c’est l’inverse.

6. La masse volumique.

La masse volumique d’une étoile varie avec la distance au centre. En surface la limite est imprécise : c’est la photosphère. Vers la profondeur, la masse volumique augmente régulièrement jusqu’au centre.

On distingue :

  •  la masse volumique centrale, la plus élevée où se produit la fusion thermonucléaire

  •  la masse volumique moyenne, obtenue en divisant la masse totale de l’étoile par son volume total ;

  •  la masse volumique en un point quelconque, à la distance r du centre.

Quelques exemples de masse volumique moyenne:

  •  Soleil : 1 g / cm3

  •  naine blanche : 109 g / cm3

  •  étoile à neutrons : 1014 g/cm3

  •  géante rouge : de l’ordre de 10-6 g/cm3

7- La composition chimique

On l’évalue avec les pourcentages en hydrogène (X), hélium (Y) et autres corps, éléments lourds appelés « métaux » (Z). Ces proportions sont connues par la spectroscopie.

La métallicité est donnée par le rapport des concentrations du Fer et de l’Hydrogène : [Fe/H]. Elle est donnée par rapport à la composition chimique du Soleil la mieux connue.

[Fe/H] = log(NFe/NH)Etoile  – log(NFe/NH) Soleil

 

Elément

Z

n(Z)/n(1)

A

m(Z)/m

H

1

1,00E+00

12,00

7,04E-01

He

2

1,00E-01

11,00

2,80E-01

Li

3

1,26E-11

1,10

6,10E-11

Be

4

2,51E-11

1,40

1,58E-10

B

5

5,01E-10

2,70

3,78E-09

C

6

3,31E-04

8,52

2,78E-03

N

7

8,32E-05

7,92

8,14E-04

O

8

6,76E-04

8,83

7,56E-03

F

9

3,16E-08

4,50

4,18E-07

Ne

10

1,20E-04

8,08

1,69E-03

Na

11

2,14E-06

6,33

3,43E-05

Mg

12

3,80E-05

7,58

6,45E-04

Al

13

2,95E-06

6,47

5,56E-05

Si

14

3,55E-05

7,55

6,96E-04

P

15

2,82E-07

5,45

6,10E-06

S

16

2,14E-05

7,33

4,79E-04

Cl

17

3,16E-07

5,50

7,83E-06

Ar

18

2,51E-06

6,40

7,01E-05

K

19

1,32E-07

5,12

3,60E-06

Ca

20

2,29E-06

6,36

6,41E-05

Sc

21

1,48E-09

3,17

4,64E-08

Ti

22

1,05E-07

5,02

3,50E-06

V

23

1,00E-08

4,00

3,56E-07

Cr

24

4,68E-07

5,67

1,70E-05

Mn

25

2,45E-07

5,39

9,42E-06

Fe

26

3,16E-05

7,50

1,23E-03

Co

27

8,32E-08

4,92

3,42E-06

Ni

28

1,78E-06

6,25

7,29E-05

Cu

29

1,62E-08

4,21

7,20E-07

Zn

30

3,98E-08

4,60

1,82E-06

Composition du Soleil en proportion de la concentration en hydrogène et masse de l’élément en fonction de la masse moyenne m. Réf.: Grevesse & Sauval, 1998, Space Sci. Rev. 85, 161

Le diagramme HR permet de classer les étoiles (de notre Galaxie) en deux types de populations :

-          population I, comprenant des étoiles jeunes, dont la métallicité est forte (jusqu’à 2 %, valeur qui représente la métallicité du Soleil). Elles se trouvent essentiellement dans les bras spiraux de la Galaxie, noyées dans la matière interstellaire.

-          population II, constituée d’étoiles vieilles, à métallicité beaucoup plus faible. Elles ne se trouvent pas dans les bras spiraux. Les géantes rouges et les naines blanches font partie de la population II. Les amas globulaires sont de population II exclusivement, ainsi que les galaxies elliptiques.

Pour un âge global donné, une population stellaire apparaît d’autant plus bleue que sa métallicité est plus élevée.

La métallicité dans les atmosphères stellaires entraîne un effet de serre ! Celui-ci est d’autant plus important que l’étoile est plus froide. Il joue donc un rôle dans les étoiles de faible masse.

On parle quelquefois de population III, pour classer des étoiles de métallicité quasiment nulle. De telles étoiles seraient vraiment très vieilles, formées juste après le Big Bang. On n’en a pas observé.

 

8- L’âge

Il est obtenu par l’étude des amas stellaires. Le diagramme HR, température-luminosité donne des courbes isochrones. La théorie physique nous apprend que l’âge zéro est celui où l’étoile quitte la séquence principale. L’abondance en fer augmente avec l’âge.

 

 

Isochrones stellaires (l'âge est indiqué en milliard d'années).

Cependant ces déterminations supposent la connaissance du fonctionnement interne des étoiles. Ce n’est donc pas un paramètre directement mesurable sans théorie de la physique stellaire interne.

9- Le déplacement des étoiles.

Le mouvement réel est inobservable. Par contre deux mesures sont possibles : la vitesse radiale par effet Doppler en spectroscopie et le mouvement propre à l’aide de photographies répétées du ciel.

La vitesse radiale est mesurée sur la ligne observateur-étoile. Elle est en km.s-1. Le mouvement propre (qui est aussi une vitesse) est mesuré perpendiculairement à la direction précédente, sur le fond du ciel. Elle est exprimée en secondes d’arc par an puis transformée en vitesse tangentielle en km.s-1. La vitesse réelle est la résultante de ces deux vecteurs-vitesse.

nom

distance AL

parallaxe

mvt propre

vitesse
tangentielle
km/s

vitesse
radiale
km/s

vitesse
résultante 
km/s

magnitude

étoile de Barnard

6,1

0,552"

10,31"

88

-108

139

9,7

étoile de Kapteyn

12,7

0,256"

8,81"

163

+245

294

9

9352 Lacaille

12

 

6,9"

 

+10

 

7,4

CD -37° 15 492

15,5

 

6,09"

 

+24

 

8,3

61 Cygni

11,1

0,294"

5,21"

84

-64

105

5,6

Wolf 359

8,0

0,429"

4,70"

52

+13

54

13,5

ε Indien

11,2

0,291"

4,69"

76

-40

89

4,7

O2 Eridani A

15,9

0,205"

4,08"

94

-43

104

4,5

Proxima Centauri

4,3<

0,762

3,85"

24

-16

29<

0,3

Lalande 21185

7,9

 

4,78"

 

-87

 

7,6

BD +5° 1 668

12,4

 

3,73"

 

+22

 

10,1

8760 Lacaille

12,5

 

3,46"

 

+22

 

6,6

étoile de Van Maanen

13,2

 

2,98"

 

+238

 

12,3

Paramètres de certaines étoiles.

Suite: Relations entre les paramètres observables.